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Entrevue touchante fée des Rêves d'enfants
Publié le : 1 décembre 2014
J’ai rencontré une fée, une vraie!
Toute petite, délicate, Suzie Mousseau arrive d’un pas léger, les pieds chaussés d’espadrilles à paillettes. Ses yeux foncés sont vifs et rieurs, et de son chignon s’échappent des mèches folles qui courent comme de petits serpents sur ses épaules. Je me dis qu’elle a le physique de l’emploi puisque Suzie Mousseau est, depuis 20 ans, la fée des rêves du chapitre Québec de la Fondation Rêves d’enfants. Portrait d’un croisement entre un lutin mutin et la fée Clochette.
« Aujourd’hui est un jour gai », me dit-elle en m’offrant un siège. « Je fais des appels aux familles dont les enfants ont été acceptés par la Fondation. Je préfère que ce soit les parents qui les informent parce que c’est une bonne nouvelle. D’habitude, ils doivent annoncer une récidive ou de nouveaux traitements. »
Je devine que certains jours sont moins gais… Je devais rencontrer Suzie trois semaines plus tôt, mais elle a dû annuler parce qu’elle devait réaliser le rêve de trois enfants en fin de vie. Dans ces cas-là, elle sait qu’elle ne les reverra pas.
Comment devient-on fée des rêves?
S.M. Oh! c’est une histoire banale! Je travaillais en événementiel à organiser des soirées grandioses. Je savais que ça n’allait pas durer alors j’ai répondu à une annonce de la Fondation qui cherchait une coordonnatrice.
Pourquoi as-tu décroché l’emploi?
S.M. Je pensais que c’était à cause de ma formation en travail social, mais non. Ils m’ont choisie parce que j’étais déjà engagée comme bénévole dans l’organisation d’activités caritatives. Disons que c’est le mélange entre mon expérience et mes dispositions qui me l’a fait obtenir.
Du glamour de l’événementiel à la fondation caritative. N’as-tu jamais regretté ta décision?
S.M. Jamais! Le salaire n’était pas le même, mais j’étais jeune, je n’avais pas encore d’enfant alors c’est un sacrifice que je pouvais faire. Jamais mon travail ne m’aurait donné autant de satisfaction que celui que je fais ici. Le premier appel que j’ai eu s’est transformé en rêve. J’ai vite compris quelle différence je pouvais faire. Un souper gastronomique ou un souper avec un joueur de hockey, c’est juste de l’organisation. Mais ce court moment-là donne tout un lot de joies quand c’est le rêve d’un enfant malade, parce que tout son entourage en profite.
Tous les rêves ne doivent pas être simples à réaliser?
S.M. Ce ne sont pas les plus fous qui sont les plus difficiles à coordonner. La complexité vient de la condition physique de l’enfant et de ce qu’il faudra sur place comme équipement médical. Dans tous les cas, la dernière semaine avant qu’un rêve se réalise est folle. Ça oui! Alors, je ferme ma porte. Il faut que je reste concentrée parce que je ne peux échapper aucun détail. Mes collègues le savent. Il faut me laisser tranquille. Je ne peux pas ternir la réputation de la Fondation.
Quel est le rêve le plus demandé?
S.M. Les voyages! Surtout Disneyworld à Orlando et c’est normal. Ce sont des enfants, c’est un endroit magique et ils sont très bien organisés. Quand les familles reviennent d’un voyage, elles sont transformées avec des souvenirs de moments partagés en famille. La maladie d'un enfant, ça affecte aussi les frères et les sœurs. Les enfants sont heureux quand leur rêve profite à tout le monde.
Quel a été le rêve le plus fou?
S.M. Le premier voyage à Bora-Bora. C’est à cause de la téléréalité Occupation Double. La production avait emmené des couples à Bora-Bora. Alors la destination est devenue un rêve de plus en plus fréquent chez les adolescents. Pour le premier voyage, il a fallu trouver les ressources, les déplacements, tout ça. Depuis, je suis la « Queen de Bora-Bora ». Quand les chapitres des autres provinces ont des demandes, ils m’appellent.
Qu’est-ce qui est le plus difficile?
S.M. « Quand un enfant décède avant que le rêve soit réalisé. On ne s’habitue jamais. » Elle le dit doucement. Elle me désigne la croix du mont Royal qu’on voit de la fenêtre. « L’ange du parc Jeanne-Mance est un peu plus loin. Je ne le vois pas, mais je sais qu’il est là. Je ne sais pas qui est derrière, mais ils ont besoin d’être faits fort parce que ça fait 20 ans que je leur envoie de la « shnout ». Il m’arrive de les engueuler et de pleurer à gros sanglots. La mort des enfants est toujours injuste. C’est épuisant, mais chacune de mes larmes est le respect que j’ai pour eux. »
Est-il nécessaire de s’endurcir?
S.M. Non, on ne s’endurcit pas et je ne veux pas. Je n’aurais plus la sensibilité et l’écoute qu’il faut pour bien faire mon travail. J’entends tellement de gens me dire : « Tu es tellement équilibrée ». Je ne suis pas équilibrée, je suis « focussée »! Il faut être plutôt sensible, même un peu folle pour faire ça. Mais j’y retourne parce que je ne m’arrête pas à la maladie. Rêves d’enfants, ce n’est pas de la maladie, c’est de la magie! Je veux juste réaliser leur rêve et pendant que je le fais, j’ai envie de m’amuser.
Lorsqu’on reçoit chez Croix Bleue la copie des messages de remerciement des familles, on voit que souvent, ils te sont directement adressés.
S.M. C’est parce que c’est moi qui leur parle, c’est moi qui travaille directement à réaliser le rêve. Mais ce sont toutes les équipes qui font de Rêves d’enfants ce qu’elle est. Quand les parents me demandent : « Comment vous remercier? », je leur réponds toujours : « Parlez de nous. Parlez de la Fondation autour de vous. On ne sait jamais dans quelle oreille ça tombera. »
Une histoire banale, disait-elle. Suzie Mousseau est tout sauf banale. Je la remercie de m’avoir accordé de son temps. Elle me raccompagne vers la sortie et ne s’étonne pas que je lui fasse une accolade au lieu de lui serrer la main. Ce n’est pas tous les jours qu’on croise une vraie fée. J’en ai profité.
Les familles qui voyagent avec Rêves d’enfants sont assurées gracieusement par Croix Bleue. Durant le voyage, la clause d’exclusion pour la maladie de l’enfant est levée.
En ce temps de partage, Croix Bleue vous invite à faire un don à la Fondation Rêves d’enfants.